A l'occasion de la sortie de l'étude que nous avons mené sur "Vieillir avec le VIH" avec un collectif composé de MoiPatient et 13 associations (1) engagées dans l'accompagnement des personnes vivant avec le VIH nous aimerions appeler les pouvoirs publics à prendre des mesures concrètes pour répondre aux défis spécifiques liés au vieillissement avec le VIH.
En 2020, près de la moitié des 175 000 personnes vivant avec le VIH en France avaient plus de 50 ans (2), et plus d’un nouveau diagnostic sur cinq touchait cette tranche d'âge. Cette tendance souligne l'urgence de prendre en compte les besoins des seniors vivant avec le VIH, d'autant plus que d'ici 2030, ils représenteront 70 % de l’ensemble des personnes concernées (3).
Pour mieux comprendre les besoins et attentes de cette population grandissante, MoiPatient, une plateforme de recherche collaborative par et pour les patients, a initié et coordonné cette étude avec la participation de 13 associations et le soutien institutionnel de ViiV Healthcare. L’enquête a été diffusée sur l’ensemble du territoire français fin 2023 et a permis de recueillir les réponses de 425 personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans et de 89 professionnel·les impliqué·es dans leur parcours.
Les résultats de l’étude interpellent et font ressortir des difficultés qui entravent l’accès aux soins des personnes, leur autonomie, leur vie sociale, affective et sexuelle, leur accès au logement, et leur condition de vie au sens large. A titre d’exemple, plus d'un tiers des personnes concernées déclarent reporter des soins pour des raisons financières.
La moitié des personnes concernées font face à des difficultés pour subvenir à leurs besoins, 29,1 % des non retraité·es interrogé·es sont actuellement sans emploi. Au total, plus de la moitié des répondants vivent avec moins de 1500€ par mois, alors que 64 % n’ont pas encore atteint l’âge de la retraite. Les personnes migrantes, largement touchées par le VIH mais difficiles à atteindre par le biais de ce type d’enquêtes, connaissent des défis économiques encore plus importants.
La persistance des discriminations et stéréotypes a de fortes conséquences sur l’accès aux soins des personnes. Si 91% ont une charge virale indétectable, empêchant toute contamination, un cinquième des répondants se sont déjà vu refuser des consultations médicales en raison de leur séropositivité, au cours de leur vie.
« Vieillir avec le VIH c’est surtout percevoir une limitation dans son quotidien » (4). Les résultats de l’étude montrent un isolement vécu par les personnes concernées, qui impacte leur santé mentale et leur qualité de vie. Presque 60% des personnes estiment leur vie sociale pas, peu ou moyennement épanouie et plus de la moitié des personnes considèrent leur vie sexuelle et affective comme pas ou peu épanouie. Alors que 32,8% jugent leur état de santé psychologique mauvais ou plutôt mauvais, 75 % déclarent n’avoir personne sur qui compter pour être accompagné·e en cas d’hospitalisation.
Les perspectives sont préoccupantes pour les personnes de plus de 50 ans vivant avec le VIH, notamment en ce qui concerne les solutions de logement pour leur retraite. Selon l'étude, 56 % des répondants expriment leur réticence à intégrer des maisons de retraite ou des EHPAD, craignant des discriminations, une prise en charge inadéquate du VIH ou encore des maltraitances.
Si le travail réalisé par les professionnel·les de santé, travailleurs·euses sociaux·les ou encore associatifs qui accompagnent les personnes est à saluer, le manque de moyens mis à leur disposition est à déplorer. Plus d’un tiers déclarent manquer d’un carnet d’adresse suffisant pour orienter leurs patient·es vers les spécialistes nécessaires à une bonne prise en charge. Alors que 70 % des personnes vivant avec le VIH souffrent de comorbidités pouvant être associées à leur séropositivité, le manque de prévention en la matière préoccupe les professionnel·les qui les accompagnent. Ces derniers soulignent également le manque de coordination entre les acteur.ices de la prise en charge mais aussi entre la médecine de ville et l’hôpital.
Ce constat, partagé par les personnes concerné.es., révèle la nécessité d’une meilleure coordination et d’une approche globale dans la prise en charge. Comme le rappelle Jean-Luc Romero-Michel, Adjoint à la Maire de Paris et Président d’Élus Locaux Contre le Sida, à l’occasion de la restitution des résultats de l’étude le 9 avril 2024, « alors que les premier·es concerné·es ne voyaient pas initialement le vieillissement comme une perspective envisageable avec cette maladie, il est désormais incontournable de prendre en compte cette dimension dans la prise en charge globale des personnes vivant avec le VIH ».
Les résultats de l’étude recoupent les constats observés par le groupe « bien vieillir avec le VIH » (5) et confortent ses recommandations pour garantir le bien-être et une prise en charge de qualité des personnes vivant avec le VIH de plus de 50 ans.
Vous pouvez télécharger l’intégralité des résultats de l’étude “Vieillir avec le VIH” en haut à droite de cette page.
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