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12.03.2014

France Lert : «Dans les DOM, l’épidémie du VIH est différente d’un département à un autre»

Sandra : On va partir au soleil, on va parler des Antilles. Tina, si je te parle des Antilles, de la Réunion, de la Guyane. Si je te dis, du jour au lendemain, tu pars vivre en Martinique. Je parle de la Martinique parce que moi je suis originaire de là-bas. Tu te dis quoi ?

Tina : D’un côté, on pense au soleil, aux palmiers, aux plages. Moi, je connais plutôt la Guadeloupe et ça fait rêver. Mais de l’autre côté puisque concrètement, je suis en couple avec une personne des Antilles, la question on se l’est un peu posée et on s’est décidé de rester en métropole parce que professionnellement c’est plus, il y a plus de choses à faire parce qu’élever ses enfants, c’est peut-être plus facile, niveau études, il y a plus de possibilités. C’est notre choix.

Sandra : Là, on va parler de la situation des personnes séropositives aux Antilles, à la Réunion, en Guyane donc dans les DOM et aussi à Saint-Martin qui est un peu cas à part, j’ai vu dans le rapport Vespa 2, avec France Lert qui est avec nous à l’émission. Quand on parle des Antilles, on pense tout de suite au soleil, la plage, la vie est belle. Mais dans le rapport Vespa 2, j’ai vu que ce n’était pas tout à fait le cas. Avant de parler de la situation sociale et économique des personnes vivant avec le VIH, je vous propose d’écouter Carole, qui elle, habite en Martinique, à Fort-de-France et on va l’écouter tout de suite.

Début de l’enregistrement.

Sandra : Te souviens-tu du jour où tu as appris ta séropositivité ?

Carole : Le jour ? Non, pas vraiment. Mais la période c’était au moment où on faisait la prise de sang pour, comment on appelle ça ?

Sandra : Pour faire un bilan ?

Carole : Non, c’est pour savoir si on est enceinte ou pas. J’ai oublié le nom.

Valérie : Un test de grossesse ?

Carole : Non, non, il y a un nom.

Valérie : Pour savoir le nombre de…

Carole : Oui voilà. Et c’est à ce moment-là qu’ils ont vu que j’étais séropositive. Mais le médecin ne m’a pas dit tout de suite. Il m’a envoyée au CHU, dans le service. Le médecin traitant m’a juste dit qu’il y a juste un petit microbe dans le sang donc pour avoir plus de renseignements, de monter au service.

Sandra : C’était en quelle année ?

Carole : C’était en 1996. Et voilà, je suis allée dans le service. Ils ont refait la prise de sang. Tout de suite après, je crois 2h après, ils sont venus me dire que je suis séropositive. Ils ont dit directement, ils ne sont pas passés par 4 chemins.
Sandra : Savais-tu de quoi il s’agissait ?

Carole : Pas du tout. Moi j’ai laissé le médecin parler (rires). J’ai laissé parler le médecin puis voilà quoi. J’ai dit s’il est en train de parler c’est que c’est peut-être urgent ou je ne sais pas trop quoi. Je n’avais pas trop envie d’entendre quoi que ce soit. Même s’il donnait des explications vis-à-vis du VIH et tout ça. Vu aussi que la façon qu’il parlait, qu’il discutait, c’était des mots de médecins et tout ce qui s’ensuit. Moi je n’ai pas besoin de savoir ça.

Sandra : Qu’est-ce que tu avais besoin de savoir ?

Carole : Avoir des explications oui mais, avec nos mots à nous.

Valérie : Des mots simples.

Carole : Pas des HTC, des je ne sais pas trop quoi (rires).

Sandra : Que s’est-il passé ensuite ? Après ce premier entretien ?

Carole : Je n’ai pas attendu jusqu’à la fin, je me suis levée, je suis partie.

Sandra : Ah bon ? Le médecin n’avait pas fini les explications tu es partie.

Carole : Je suis partie et j’étais avec justement mon compagnon, ce qui veut dire le père de mon fils. Lui aussi n’a rien compris. Il n’a absolument rien compris de ce qu’il expliquait. C’est le lendemain que je me suis dit bon, je vais peut-être aller voir mon médecin traitant, pas retourner à l’hôpital. Il m’a expliqué un petit peu ce qui se passe. Mais même là, je n’avais pas vraiment compris. J’ai dit peut-être c’est quelque chose d’urgent et il faut que je sois sous traitement par rapport à mon fils, par rapport à mon bébé tout ça. C’est un autre médecin qui m’a expliqué vraiment la situation. C’est justement ce médecin qui sortait de France qui m’a expliqué un petit peu la situation et c’est de là que j’ai pris la décision de me mettre sous traitement. Je l’ai pris un petit peu en terme de banalité. C’était plus par rapport à mon bébé. Si c’était pour dire ah oui je suis malade, je suis ceci et puis voilà, je ne vais pas tarder à mourir et tout ça… j’ai pensé plus à mon bébé. La force c’était mon bébé. Même mon compagnon qui était à côté, je l’avais complètement oublié (rires).

Sandra : Comment ça oublié ?

Carole : Vraiment complètement oublié. Le truc c’est que, quand on envoie quelqu’un à l’hôpital, c’est pour quelque chose. Moi je me suis dit ça, c’est pour quelque chose, c’est quelque chose de grave ou soit… me mettre sous traitement ou me faire suivre par quelqu’un d’autre, je ne sais pas trop quoi. Mais si c’est pour aller à l’hôpital, c’est pour quelque chose de grave. Mais je n’ai pas vraiment réalisé la situation du coup j’ai juste mis en tête c’est mon bébé.

Sandra : Vous avez pris la décision de vous protéger ?

Carole : Non, il n’a pas voulu.

Sandra : Pourquoi ?

Carole : Je ne sais pas.

Fin de l’enregistrement.

Sandra : Carole au micro de l’émission de radio Vivre avec le VIH. Au Comité des familles, il y a très peu de personnes originaires de ces départements et une m’a même dit sur le ton de l’humour un peu : En Martinique, on dirait qu’il n’y pas de séropositifs. Ça n’existe pas, on n’en parle pas. En revanche il y a des diabétiques ! Bon alors nous déjà on sait qu’il y a Carole. France Lert, pouvez-vous me confirmer que le VIH concerne aussi ces populations qui vivent dans les DOM

France Lert : Oui, bien sûr. Dans les différents départements d’outre-mer, il y a des personnes, il y a une épidémie d’infection VIH. Mais ce qu’il faut tout de suite avoir en tête, c’est que cette épidémie elle est très différente d’un département à l’autre parce que ces DOM certes, ils ont un rapport administratif particulier avec la France, notamment depuis la départementalisation de 1946. Mais sur le plan du, et ça, ça leur est commun, sur le plan du VIH, on a à la Réunion, une épidémie très basse avec une proportion importante d’hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. En Martinique on a une épidémie qui ressemble un petit peu à celle de l’Ile-de-France avec à peu près 20, 25% d’homosexuels et une population essentiellement hétérosexuelle. En Guadeloupe, et bien plus encore en Guyane, on a une épidémie hétérosexuelle avec une part très importante de population immigrée, principalement des Antilles et pour la Guyane immigrée du Brésil ou du Surinam qui sont évidemment des pays voisins. En Martinique et à la Réunion, on a une épidémie qui est de lors de celle de la France métropolitaine et pour la Martinique de l’Ile-de-France. Et puis dans les autres départements, des situations qui se rapprochent beaucoup plus d’une épidémie généralisée.

Sandra : J’ai vu que dans l’enquête Vespa 1, la Réunion n’était pas incluse. Pourquoi ?

France Lert : Dans la première étude, on était centré sur les difficultés. Or, la Réunion avec une épidémie très basse d’une part, et avec une très bonne organisation locale entre deux services hospitaliers très investis et une seule association très importante qui d’ailleurs existe depuis le début de l’épidémie et qui existe encore aujourd’hui, qui est très active, on s’était dit mais dans le fond, ça va bien à la Réunion, on ne va pas faire l’étude. Les personnes de la Réunion, les acteurs et en particulier les chefs de service médicaux, ont trouvé que c’était quand même pas très juste. Dans la deuxième enquête, on les a inclus parce qu’on s’est dit que c’était un petit peu idiot de n’avoir pas un tableau complet. Maintenant ce tableau n’est pas complètement complet parce qu’il y a le département de Mayotte qui a été créé en 2011, qui comme vous le savez a une situation très particulière du point de vue politique, démographique et sociale et sanitaire encore plus. En 2011 l’enquête était en cours quand la départementalisation a été organisée. Et donc on n’a pas fait l’enquête à Mayotte. Mais si à l’avenir il y a de nouvelles études, c’est évident que Mayotte sera incluse.

Sandra : J’ai vu aussi qu’il y a une enquête à Saint-Martin.

France Lert : Saint-Martin a changé de statut administratif entre 2003 et 2011. C’est aujourd’hui une collectivité d’outre-mer détachée de la Guadeloupe. Mais sur le plan du VIH, ça n’a pas changé grand-chose dans la mesure où il y a un service qui a été dirigé sur le plan du VIH par François Bissuel, puis maintenant par Sophia Stegmann, un médecin extrêmement énergique et compétent avec une équipe qui l’est tout autant. La particularité de Saint-Martin, c’est que c’est une île qui est coupée en deux bien que ce soit un mouchoir de poche, avec une partie néerlandaise et une partie française, avec une population qui circule entre les deux régions. Mais on a bien sûr inclus Saint-Martin qui a une file active d’environ 400 personnes.

Transcription : Sandra Jean-Pierre

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