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23.01.2014

Francis : «Je connais des tas de personnes séropositives en Afrique qui témoignent à visages découverts»

Sandra : Nous allons écouter Francis, sur l’annonce de la séropositivité, on a eu une discussion, je vous propose de l’écouter et après on réagit.

Début de l’enregistrement.

Francis : Bonjour, je suis Francis, 57 ans, personne séropositive depuis les années 2000 et je suis militant au Comité des familles.

C’est vrai que le migrant subsaharien arrive ici en Europe avec déjà des acquis. Avec une façon de voir, une façon de faire, etc. Arrivé ici il est confronté à d’autres manières de faire. Tant qu’il est dans la vie active, il se frotte un peu, il s’améliore, il garde certaines choses, il lâche d’autres, c’est tout à fait normal. Son milieu, le milieu avec lequel il évolue, apprend aussi qu’on peut faire autrement ailleurs, on peut avoir d’autres attitudes. Son milieu en principe devrait apprendre un peu de lui et puis adopter certaines choses et laisser certaines choses.

Maintenant, quant à la dicibilité de sa séropositivité dans le milieu des migrants, c’est là où je suis plutôt surpris de voir que l’Europe ou la France particulièrement est en retard sur l’Afrique parce que moi, en Afrique je militais dans une association de lutte contre le VIH, je connais des tas de personnes qui font des témoignages à la télévision, à visage découvert, qui en parle dans leur milieu, mais je n’ai jamais vu quelqu’un qu’on a jeté au feu parce qu’il était séropositif. Bien sûr les personnes qu’on a en face de nous sont des humains, comme tous les autres humains. Certains vous acceptent, d’autres vous rejettent. Séropositif ou pas ici en Europe on vous rejette déjà pour la couleur de votre peau, il ne faut pas avoir peur de le dire. La France est un pays très ouvert, très social dans les principes et dans les textes ok. Mais dans la vie quotidienne, les actes d’homophobie existent, les actes de racisme existent. Du coup par rapport à ça, les personnes séropositives en France ici, il y en a qui les acceptent, il y en a qui ne les acceptent pas. Il y en a qui les acceptent en théorie, mais quand on va leur dire aller vivre ensemble : « ah non, non pas avec moi ». « Est-ce que tu laisserais tes enfants aller passer une journée chez lui ? – Ah non, non ». Après jusqu’où va cette acceptation. Du coup moi ça me choque quand on dit que c’est dans la communauté africaine que c’est plus difficile à dire que dans la communauté française. Je dis non. Les deux communautés se ressemblent. Il y a ceux qui sont ouverts, ceux qui ne sont que moyennement ouverts, et puis ceux qui sont complètement idiots, excusez-moi le terme parce qu’ils sont complètement à côté de la plaque, complètement ignorants, ils ont des attitudes… Il y en a ici autant qu’en Afrique.

Sandra : On avait reçu un pédiatre à l’émission qui est parti en Afrique et qui dit que quand on annonce une séropositivité en Afrique c’est différent. Ici en France, à part ceux qui ont connu l’époque des années 80, le VIH n’est plus synonyme de mort, même s’il y a des méconnaissances. Alors qu’en Afrique, il y a encore des endroits où des personnes atteintes du VIH on la voit mourir parce qu’elle est atteinte du VIH et sans doute d’une maladie associée. Mais en tout cas c’est quelque chose d’actualité, on meurt encore du VIH dans les pays d’Afrique. C’est pour ça qu’il y a cette difficulté d’en parler les communautés africaines parce que c’est quand même synonyme de mort.

Francis : Le VIH synonyme de mort dans une certaine mesure oui, mais je dis bien dans une certaine mesure. Encore une fois, il ne faut pas généraliser les choses parce qu’on connait des personnes vivant avec le VIH en Afrique qui sont sous traitement, qui prennent leur traitement et qui se portent bien. Moi, je connais des gens du Burkina Faso séropositifs qui sont membres du conseil d’administration de Sidaction ici à Paris. Tous les 3, 4 mois ils viennent pour le conseil d’administration à Sidaction, ils ne sont pas morts, ils sont personnes porteuses du VIH vivant en Afrique, voilà. Ils en parlent autour d’eux, ils sont connus. L’association AIDES finance des choses pour les associations africaines et ces bailleurs fonds vont sur le terrain et regardent faire, suivent un peu leur financement, ce qui est tout à fait normal d’ailleurs. Mais ils regardent faire les choses sur le terrain, ils savent que bon, voilà. La dicibilité jusqu’à preuve du contraire pour moi, ça reste presqu’égal à la société. Parfois je trouve d’ailleurs qu’ici on est vraiment très en retard. Prenez un chirurgien dentiste. Aujourd’hui combien sont-ils les chirurgiens dentistes chez lesquels vous rentrez et vous dites, je suis une personne séropositive sous traitement. Il va vous recevoir combien de fois ? Il va tourner et dire vous savez votre cas, je ne peux pas le traiter. Moi, ça m’est arrivé au moins à 3 reprises dans des cabinets dentaires. On m’a dit non non, votre cas je ne peux pas. J’ai dit bon, donnez-moi l’adresse. Non écoutez c’est trop cher, vous ne pourrez pas payer. Qu’est-ce qu’il en sait de ce que je peux payer ou pas ? Je bénéficie d’une des meilleures mutuelles de la place aujourd’hui. Je vais dans d’autres cabinets et je refuse d’annoncer la sérologie, on me prend bien en charge et quand on voit d’ailleurs mon contrat de mutuelle, ils sont tellement contents parce que c’est vite remboursé, c’est très bien remboursé. Donc c’est pour vous dire que, dans la société française, parfois ceux qui sont censés bien comprendre la situation et connaître les évolutions de la maladie, malheureusement je constate que souvent c’est eux qui sont les plus ignorants, les plus idiots, excusez-moi du terme parce que moi ça me révolte. Et ça, vous ne verrez pas ça en Afrique. Si quelqu’un qui a un niveau de médecin chirurgien dentiste a une telle attitude, que dire de l’Africain aux confins de sa brousse africaine qui n’a pratiquement pas fréquenté, qui ne connait rien du VIH, du VIH il n’a vu que des gens mourir et mourir mal, mourir dans la saleté, etc. Il ne connait que ça. Que dire donc de lui ? Si vous comparez les deux, vous allez tolérer un peu l’intolérance africaine ou la peur de l’Africain par rapport à l’Européen, par rapport à la personne nantie, éclairée, instruite, je ne sais pas quoi. Du coup quand on parle de la dicibilité en Afrique je trouve qu’on exagère trop ici. Ou bien on est hypocrite, ou bien alors ça ressemble alors un peu à une stigmatisation de cette communauté-là. Voilà ma position là-dessus.

Sandra : Mais alors les soignants en Afrique, as-tu déjà été confronté là-bas en Afrique à devoir te faire soigner par un dentiste et tu as dit que tu es séropositif ? Tu sais comment ils réagissent un peu les soignants en Afrique ?

Francis : Par rapport aux dentistes, je n’ai pas eu affaire à eux en Afrique. Je n’ai pas entendu parler parce que j’ai pas mal de connaissances, d’amis, personnes vivant avec le VIH en Afrique, je n’ai pas eu de témoignage particulier en la matière. C’est vrai aussi que certains soins coutent excessivement chers. En Afrique souvent il n’y a pas de véritable prise en charge donc les gens se débrouillent, c’est la grande débrouille. Du coup, je ne sais pas.

J’oubliais une idée, c’est que les gens meurent encore du VIH, oui c’est vrai. Les gens meurent encore du VIH, mais en Afrique est-ce qu’on meurt plus du VIH que du paludisme ? Je ne crois pas. Donc mortalité pour mortalité, je pense que le paludisme au jour d’aujourd’hui, malgré l’évolution de nos connaissances, on meurt encore du paludisme qui est, j’allais dire n fois moins grave au départ que le VIH.

Sandra : Tu as parlé de deux grosses associations, AIDES et Sidaction. Tu as dit qu’eux savent comment ça se passe dans certains pays d’Afrique puisqu’ils aident des structures en Afrique, des associations. Est-ce que tu trouves que, par exemple lors du Sidaction ou alors lors de la journée mondiale de lutte contre le sida, est-ce que tu trouves que, ce genre de constat est assez mis en avant par ces associations ? Donnent-elles une image assez positive de l’Afrique ?

Francis : Donner une image assez positive de l’Afrique, je crois. Je pense pouvoir le dire. En revanche, est-ce qu’ils disent suffisamment qu’on stigmatise les noirs ici et que ce n’est pas tout à fait comme ça en Afrique ? Là, je le pense moins. Maintenant, voilà est-ce que c’est vraiment une priorité de passer le temps à rabâcher cela plutôt que d’aller à l’essentiel qui est de recueillir les fonds, d’animer des projets, financer des projets, d’aller soutenir etc, lequel est plus urgent, lequel est le plus utile. Donc je pense que, je les excuse en pensant que, entre les priorités ils choisissent les plus grandes priorités. Parce que passer le temps à dire non vous pensez mal de l’Afrique, ce n’est pas comme ça en Afrique. Ça avance à quoi ? Ça pourrait peut-être changer la mentalité ici, mais juste un peu. Et après tout même si cette mentalité changeait, est-ce que ça soigne pour autant des Africains là-bas ? Non. Je pense qu’ils vont au plus utile, plus nécessaire plutôt que de perdre leur temps.

Sandra : Penses-tu que les soignants quand ils reçoivent des personnes migrantes, des personnes d’Afrique subsaharienne par exemple, dans certains moments les soignants doivent-ils avoir un comportement, s’adapter ?

Francis : Oui, il y a quand même des aspects où il y a des particularités et je suis agréablement surpris à l’hôpital Tenon de voir que pratiquement tous les médecins infectiologues ont été faire des séjours au Burkina Faso. Ils ont des partenariats avec les hôpitaux du Burkina Faso, les médecins du Burkina Faso viennent ici, les médecins de Tenon vont là-bas. Je ne sais pas quelle est la situation dans les autres hôpitaux, mais je pense que pratiquement chaque hôpital a des partenariats avec certains hôpitaux africains et ils vont faire des séjours là-bas. Du coup, pour la plupart il y a un certain nombre de choses qu’ils comprennent. Mais ce n’est pas encore le cas pour tous. Et comme je l’ai dit, certains migrants en arrivant ici comprennent certaines choses. Mais de temps en temps on passe à côté de la plaque. En plus ici il faut dire dans les hôpitaux, il y a beaucoup d’associations africaines qui ont des médiateurs et des médiatrices en santé et du coup ces personnes aussi interviennent pour essayer de favoriser le dialogue entre soignants et soignés. Donc l’un dans l’autre, tout ça a tendance à s’aplanir maintenant. Mais ce n’est pas pour autant qu’il y a… les petites difficultés il y en aura toujours.

Fin de l’enregistrement.

Sandra : Francis, au micro de l’émission de radio «Vivre avec le VIH». Question pour Julienne. Dans ton milieu, si tu parles de ta séropositivité ou bien si une personne de ta communauté annonce sa séropositivité, quelles peuvent être les réactions ?

Julienne : Justement, je suis d’accord avec Francis. Le VIH c’est une maladie comme tout le reste, c’est l’information qu’on est venu annoncer cette maladie en Afrique qui a dramatisé la chose. Le paludisme tue beaucoup en Afrique plus que le VIH. On a même peur du VIH parce que tout le monde ne sait même pas de quoi il s’agit. Moi, je suis camerounaise, les associations, c’est ici en France que je suis venue découvrir toutes ces associations. Déjà en Afrique au Cameroun, je savais que le VIH c’est la maladie des blancs. C’est ici en Europe que c’est la maladie des Africains. Bien sûr, nous tous nous avons des cultures différentes. Chaque tribu a sa façon de voir les choses. Tu es malade, c’est ta famille. Quand c’est le VIH, on refuse beaucoup le VIH parce que quand on te dit qu’il n’y a pas de traitement, vous allez soigné avec quoi ? Il y avait la lèpre là-bas, on la traite et les gens ne te jettent pas. On te soigne, quand on t’annonce même cette maladie, c’est la façon qu’on t’annonce, la personne qui t’annonce même, c’est la personne qui doit t’alléger, ne doit pas dramatiser la situation et quand on commence à dire que déjà, on ne peut même pas te toucher. Tu ne veux pas me toucher comment je peux prendre ton traitement moi aussi ?

Sandra : Alain Epelboin après avoir entendu l’intervention de Francis et celle de Julienne, qu’en pensez-vous ? D’abord sur l’annonce d’une séropositivité, êtes-vous d’accord avec les propos de Francis ?

Alain Epelboin : L’annonce il faut la penser du côté du soignant et du côté des soignés. L’annonce de la séropositivité du côté du soignant en Afrique, pendant très longtemps, et je ne sais pas si on y est encore, était une honte extrême qui faisait qu’on disait à quelqu’un qu’il était séronégatif alors qu’en fait il était séropositif parce qu’on n’osait pas lui annoncer. Celui qui disait sida était l’annonciateur de la mort. Donc je pense qu’il y a déjà une différence dans les sensibilités, dans les modes d’annonce selon les cultures entre l’Afrique et tout ça. Je suis d’accord sur tout ce qu’a dit l’interlocuteur à peu près sauf quand on essaye de mettre des hiérarchies, c’est plus ici, c’est moins là-bas, je pense que ça ne sert strictement à rien. Il y a une constante absolue qui est la discrimination et si elle n’apparait pas dans un premier temps, elle va arriver par derrière. C’est une constante absolue. Sur l’annonce maintenant vue du côté des personnes. Partout c’est le choc, c’est clair. Les réactions sont très liées à la psychologie individuelle, à la personnalité, aux autres événements heureux ou malheureux. Ce n’est pas la même chose que si ça tombe quand on plein d’argent ou quand on est ruiné, au chômage, etc, en situation de migration, etc. Donc moi je dirai dans l’expérience que j’ai, dans les hôpitaux parisiens, je ne parle pas en Afrique. On appelle toujours pour des annonces finalement qui ne se passent mal où il y a un processus de décompensation, où il y a un processus de déni et ce que j’ai vu se déplacer, c’est au départ, l’annonce de la séropositivité non-maladie, où les gens ne réagissaient pas, mais quand ils ne suivaient pas leurs traitements, j’ai vu ça ces 5-6 dernières années, des cas qui ne suivaient pas bien leurs traitements où c’est la séromaladie qui apparaît et c’est là que l’annonce, la prise de conscience, ce qu’on est, ce que veut dire séropositif… et là avec les décompensations, les cauchemars, les agressions sorcellaires, le suicide social. C’est ça que je résumerai. C’est-à-dire que, dès qu’on parle de dire que c’est toi qui m’as provoqué, qui a facilité mes mots, ma maladie, on s’aperçoit que ça va concerner en première instance mes meilleurs amis d’enfance, mes copines, parce que moi j’étais en France, l’autre est jalouse, elle n’a pas fait, la parentèle avec des jeux de rôles qui sont définis et concrètement parmi ces personnes, celles qui seraient les plus à même de vous aider, c’est un suicide social, on dit houlala, si je commence à m’intéresser on va dire que j’ai de l’intérêt etc. Et c’est ça le côté dramatique de cette annonce avec un diagnostic de causalité en rapport avec la sorcellerie anthropophage, les malfaisants, les maléfices.

Sandra : C’est ça parce que dans certaines cultures il existe des remèdes traditionnels, certains qui fonctionnent, basés par exemple sur des plantes. Mais d’autres peuvent être un danger pour la personne. Je vous ai vu au forum migrant et VIH qui s’est passé au mois de novembre à la mairie du 10ème arrondissement à Paris et vous avez parlé par exemple de faux médicaments, de rituels préventifs. Comment un soignant peut alerter un patient qui suit ces pratiques ?

Alain Epelboin : Le problème, quand on parle d’autre chose que la médecine biomédicale, on veut toujours réduire ça à la pharmacopée. Et quand on réduit ça à la pharmacopée, pour faire voir s’il y a un principe pharmacologique ou s’il n’y a pas un principe pharmacologique. Or, il est clairement avéré que des potions qui n’ont strictement aucune efficacité pharmacologique, j’aimerai utiliser le mot mise en scène, arrivant au bon moment dans une relation thérapeutique avec un processus que les psychiatres appellent « post transférentiel », les gens font sans le savoir avec un guérisseur, le retour au pays, réfléchir sur soi-même. Souvent les ethnopsy vous disent il faut retourner au village pour aller consulter le vieux… Mais en même temps c’est tout un chemin où on remonte sur sa vie, on remonte sur ce qu’on est, on réfléchit, où on vit des conditions qui ne sont pas des conditions habituelles, où on jeûne plus ou moins, toute une série de choses. Donc qu’il y ait drogues efficaces ou pas, c’est l’ensemble de processus et l’intelligence et l’habileté du thérapeute qui va intervenir. Alors maintenant dans la cohabitation des deux, il y a certaines pratiques de médecine traditionnelle qui sont dramatiques. On l’a vu avec des associations qui ont pignon sur rue que je ne citerai pas pour ne pas me fâcher encore plus avec eux, du côté de Fatick au Sénégal, avec des séropositifs qu’on venait traiter où on utilisait un vieux principe à la fois des médecins populaires et de la médecine scientifique ancienne, c’est que si tu as un mal, si tu es malade, il faut expulser le mal. On te fait vomir, on te donne une purge, on te fait suer selon les sociétés. Sauf que chez un séropositif avec infection intercurrente à qui on a voulu provoquer des diarrhées, vous le tuez. Il y a la même chose d’ailleurs dans la prise en charge des diabètes par les guérisseurs où on fait vomir, on fait suer, on fait saigner, etc. Donc il y a des choses qui font problème. Et il y en a d’autres qui sont des accompagnements, qui vont remettent en harmonie et surtout qui rendent compte du désaccord culturel qu’il y a. Là où la médecine parle de virus, de bactérie et autres molécules pour désigner le mot invisible, de l’autre côté on parle de déité suprême, de saints, de prophètes, de djinns, de mami wata, de sorciers, d’ancêtre, etc. C’est à eux qu’on raccorde la causalité des mots. Donc c’est là en fait qu’il faut arriver à équilibrer la part du biomédicale et la part des médecines alternatives globalement. Être sûr qu’effectivement il n’y a pas d’opposition de principe, etc. Et savoir que le médecin sache qu’il est un élément dans une chaine thérapeutique et là ça va très bien, je vois qu’elle est prise en charge peu importe que ce soit un ostéopathe, un marabout ou je ne sais pas quoi, tant qu’on n’est pas avec des sales personnes qui abusent. Donc elle va avoir l’intelligence de ce qui se passe et de ne pas ignorer. Mais maintenant tout ça se mélange très bien. Et de toute façon, dans la pratique les gens mélangent tout.

Bruno : J’ai reconnu Francis et Julienne dans leur parcours militant. Au Comité des familles, sur les dernières années, j’ai vu vraiment ce mélange de culture qu’on a, on vient de partout. Pour moi, ça nous a permis d’organiser pas mal de choses comme les soirées séromantiques. Chaque fois je ressens le bien-être. C’est vrai que je m’éloigne un peu du sujet, mais voilà, pour moi c’est une grande revendication pour le Comité des familles, pour les personnes qui vivent avec le VIH. Pour moi on est tous concerné parce que quelque part il y a le lien avec la famille, on est tous une famille.

Tina : Sur la question de comment est perçu l’annonce, comment on peut annoncer ou non. Je pense qu’effectivement, ce qui joue beaucoup c’est la situation globale de la personne, est-ce qu’elle est dans une situation plutôt de précarité ou avec beaucoup de moyens financiers, est-ce que elle est bien entourée ou non. Tous ces aspects jouent et c’est vrai que du coup en France la communauté, parmi les personnes originaires d’Afrique subsaharienne, c’est souvent des personnes dans des situations de plus grande précarité, plus isolées parce que leur famille est restée au pays, avec moins de repères donc je pense que c’est ça aussi qui peut rendre l’annonce plus difficile pour ces personnes. C’est en prenant tout ça en compte, comme dit Bruno, en échangeant aussi les uns avec les autres, en voyant différent point de vue, ces choses-là peuvent bouger et je pense que l’idée aussi de Francis c’est de ne pas figer les choses, de ne pas dire pour telle personne de telle origine, c’est comme ça, pour les autres c’est comme ça et ça reste un peu figé, pour essayer d’enlever ces frontières et de trouver des moyens de s’entraider et d’évoluer ensemble. Tout le monde a besoin d’évoluer ici en France même parmi les médecins, ils ont besoin d’évoluer sur la question. Donc oui, tout le monde a besoin d’évoluer pour qu’on vive mieux avec le VIH aujourd’hui.

Alain Epelboin : Je vous remercie d’avoir complété. Avant de parler de culture, c’est clair, c’est d’abord des problèmes sociaux, politiques, économiques. Ça, c’est la base. Ensuite la culture, c’est important bien évidemment selon les personnes, selon les périodes. À certains moments j’ai envie qu’on me rappelle que je suis blond, il y a d’autres moments où je n’ai pas envie d’être traité en blond. Il y a certains moments c’est moi qui veux m’annoncer dans ma négritude si je parle ou ma blanchitude. C’est au thérapeute ou aux gens qui prennent en charge d’avoir cette subtilité. Quand je veux je suis nègre, quand je veux je suis blond.

Transcription : Sandra Jean-Pierre

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