Willy Rozenbaum : C’est d’abord guérir, il se trouve que là, il s’agit du VHC, du virus de l’hépatite C, avec des traitements oraux et c’est important parce qu’effectivement, jusqu’à présent, ceux qui ont fait l’expérience des traitements contre les hépatites, contre l’hépatite C en particulier, ont eu à subir des traitements injectables avec d’énormes effets secondaires et avec en particulier de l’interféron. On est en train de vivre un tournant. Je sais que ça ne concerne que 15% des personnes infectées par le VIH, c’est quand même 15% et c’est une vraie révolution qu’on est en train de vivre aujourd’hui. Aussi impressionnante et peut-être plus rapide en tout cas que celle qu’on a pu vivre sur les traitements anti-VIH. Aujourd’hui, on a une deuxième vague de produits, de première génération qui ont essentiellement pour intérêt d’améliorer l’efficacité et sans doute et c’est important, d’améliorer aussi la tolérance. Vous voyez que le nombre de produits en développement est assez important. Il va avoir une deuxième génération qui aura l’intérêt d’avoir une meilleure efficacité, une plus grande barrière à la résistance et qui aura une action, qui a déjà une action sur l’ensemble des génotypes viraux, vous savez peut-être déjà, sinon je vous l’apprends qu’il y en a 6. Le plus fréquent étant le 1 qui est subdivisé en 1a et 1b. Donc première génération uniquement active sur le génotype 1, la deuxième vague de la première génération, tous les génotypes sauf le 3 et la troisième génération sur le génotype 3. La deuxième classe de traitement qui sont les nucléosides ou les nucléotypes, les analogues de nucléosidiques de la polymérase du virus et là l’intérêt est que c’est pangénotypique c’est-à-dire que ça marche sur tous les génotypes et il y a une grosse barrière à la résistance. Il y a également des inhibiteurs non nucléosidiques de cette polymérise, ils ne sont actifs que sur les génotypes 1 actuellement. Enfin les inhibiteurs de la NS5K qui est ce complexe de la polymérisation avec plusieurs générations: une première qui ne marche que sur le génotype 1 et 4 et une activité variable peu connue encore sur les autres types de génotypes et une deuxième génération qui a une plus grande barrière de résistance. Qu’est ce que la dernière CROI nous a appris? Elle nous a donné des résultats tout à fait importants et spectaculaires. Il y a de grandes chances que ce que l’on observe chez les mono-infectés par l’hépatite C pourra être transcrit chez les co-infectés avec des réserves que l’on verra plus tard. Il y a eu une dizaine d’essais présentés avec CROI je vais essayer de vous les présenter. Dans les co-infections la plupart des premiers essais et ce que nous avons aujourd’hui à notre disposition, ont été une association d’un inhibiteur du virus de l’hépatite C associé à des interférons et à la Ribavirine. Le premier c’est le Siméprévir, on a un marqueur d’efficacité, de substitution, de la même manière que l’on a dans les années 90 identifié un marqueur de substitution qui était la charge virale pour mesurer l’efficacité des médicaments anti VIH. Ici pour définir la guérison on parle de réponse soutenue 12 semaines après l’arrêt du traitement. C’est ça le critère qui fait dire que le produit a une efficacité. Chez les Américains vous verrez souvent SVR12 ou SVR 24 c’est-à-dire la réponse au traitement 12 ou 24 semaines après la fin du traitement. Vous verrez dans les protocoles des durées de traitement qui vont de 12 à 24 voir 48 semaines.
L’une des questions qui restent c’est la durée des traitements. Dans cette étude on voit un taux de guérison que ce soit chez les patients naïfs ou des patients qui ont eu un traitement antérieur et qui ont rechuté ou des patients qui ont eu un traitement partiel ou même des répondeurs nuls aux traitements antérieurs. On a des taux de réponse qui sont particulièrement élevés, ses taux de réponse, c’est une règle pour beaucoup des traitements est moins importants lorsque la personne a déjà une cirrhose. Donc l’intérêt sera sans doute dans les années à venir de traiter là aussi le plus tôt possible et avant l’état de cirrhose. Est-ce que le traitement antirétroviral change ses résultats? Hé bien globalement non. Que les patients soient sous traitement antirétroviral ou non les résultats sont similaires. Il y a peut-être une petite tendance meilleure lorsque le patient est co-infecté. Donc un très bon résultat chez le patient naïf, jusqu’a 89%, mais le traitement contient encore de l’interféron et de la Ribavirine. Un autre produit qui est de la même classe, un inhibiteur de protéases: le faldaprevir, toujours avec l’interféron et la Ribavirine, montre finalement avec un design de protocole assez compliqué, je ne vais pas entrer dans les détails, est rester sur les résultats globaux où là aussi on est entre 70 et 80% voir même 88% de guérison ou en tout cas une réponse12 semaines après l’interruption du traitement, montrant un virus qui a disparu. Un autre produit qui fait partie d’une autre classe, le Sofosbuvir qui est un inhibiteur nucléotidique de la polymérase avec de la Ribavirine dans le génotype 1, 2, 3 sachant que chez les patients non co-infectés les taux de guérison étaient variables en fonction des études, et la durée de ses études est variée entre 70 voir 97% de guérison. L’intérêt de cette association c’est qu’il n’y a plus d’interféron. Là vous avez le design de cette étude qui a duré soit 24 semaines soit 12 semaines dans les génotypes 2 et 3.
Les résultats comme vous le voyez sont tout à fait importants puisqu’on a un taux de guérison à 12 semaines de 76% et qui se maintient à 24 semaines. Ce qui est intéressant c’est que dans le génotype 2 on est à près de 90% de réponse c’est-à-dire que ce soit chez les patients naïfs ou pré-traités. Mais chez les patients pré-traités le traitement a été prolongé jusqu’à 24 semaines. Dans le génotype 3 vous voyez que les réponses sont légèrement moins bonnes avec cette association mais elle reste encore très supérieure à tout ce que l’on avait auparavant. Un autre essai où là on a deux molécules sur la polymérase et sur le complexe de polymérisation plus ou moins associée à la Ribavirine et vous voyez ici que chez les mono-infectés et les co-infectés on est entre 90 et 100% de guérison après 12 semaines de traitement et des effets secondaires très faibles. Il s’agit d’un inhibiteur de protéase associé à un inhibiteur du complexe de réplication et de D5KA. La durée du traitement est très importante et chez les personnes mono-infectées il y a un essai qui a même testé 6 semaines de traitements par des associations de trois antiviraux. Le Sofosbuvir inhibiteur de nucléotidique de la polymérase le disthène associé au ledipasvir qui est un inhibiteur protéase. Avec 6 semaines de traitement. Également associé à un inhibiteur de NS5B et un inhibiteur de protéase , deux inhibiteurs de NS5K. On va avoir beaucoup de mal à s’y retrouver vous allez voir. Nous arrivons à des résultats étonnants puisqu’on est entre 95 et 100% de guérison. Avec une bonne tolérance. Ce qui est intéressant c’est la réponse soutenue à 12 semaines, on est entre 95 et 100% de résultats, ne serait-ce qu’avec la double association Sofosbuvir et le Ledipasvir et ce en 24 semaines. Plus la baisse de la charge virale VHC est rapide plus on peut espérer un traitement court c’est ce qui à était démontré dans cet essai.
Une autre combinaison Daclatasvir et Siméprévir a était démontrée. Là aussi un design un petit peu compliqué, il y a aussi des résultats qui varient entre 70 et 80% de bons résultats, c’est essentiellement dans le génotype 1B. Montrer que l’association Daclatasvir d’Asunaprevir de MS79 est improductive chez les MS. Là aussi sur 12 semaines les résultats sont très impressionnants avec plus de 95% de réponses soutenues à 12 semaines. Une triple association encore de produit incestueux (du même laboratoire) plus ou moins associée à la Ribavirine avec des associations de différentes classes des traitements. 12 semaines de traitements et 99,5% de guérison. Là c’est pour un génotype mais tout de même. Où en sommes-nous avec ses résultats? Hé bien à ce jour, en France et en Europe deux produits ont leurs autorisations de mise sur le marché: un inhibiteur de la polymérase et le Siméprévir qui est un inhibiteur de la protéase. En Europe nous avons pris de l’avance sur les USA , il y a une autorisation également pour un autre produit qui est le Daclatasvir qui agit sur le complexe de polymérisation. Ses produits sont pangénotypiques sachant que le Siméprévir reste actif sur le génotype 1 et 4. Quelles sont les possibilités de traitement chez les patients co-infectés? On peut continuer chez certains patients à utiliser l’Interféron et donc ça peut être Sofosbuvir plus Peg-interféron, Siméprévir Peg-interfèron Ribavirine pour les génotypes 1 et 4. Daclatasvir Interférons plus Ribavirine pour le génotype 1, 3, 4 et 6. Mais on peux déjà utilisé des associations orales sur certains génotypes sans interférons en particulier comprenant du Sofosbuvir avec la Ribavirine avec le Siméprévir ou avec le Daclatasvir. Il n’y a pas ici le Ledipasvir qui va être homologué et qui aura, me semble-t-il une autorisation temporaire d’utilisation avant l’été en combinaison avec le Sofosbuvir avec un comprimé par jour et pour un traitement de trois à six mois peut être dans certaines circonstances dans le VIH. Voilà les produits qui sont aujourd’hui utilisables, sachant qu’il est important d’imaginer que certains vont avoir des interactions avec les antirétroviraux en particulier le Siméprévir et le Daclatasvir. Comme vous le voyez le futur est encombré. On a vu qu’aujourd’hui il y a 25 traitements antirétroviraux dans le traitement anti VIH mais vous voyez que le nombre de traitements anti VHC est astronomique et donc on a quand même une grande chance d’avoir le choix et la possibilité de guérir de la maladie.
Quel est le message finalement que vous devez ramener à la maison comme disent les américains ? Le premier, c’est qu’on va vers une efficacité absolument spectaculaire avec ce que les Américains appellent les antirétroviraux directs, par voie orale. J’ai peu évoqué les effets indésirables mais on peut dire qu’ils sont considérablement réduits, ils sont mineurs, pour ne pas dire inexistant avec beaucoup des produits tout autant que c’est des produits qu’on va utiliser 3 mois, 6 mois maximum. Ce qui est très important à noter, même si les études dans les co-infections ne sont pas développées avec l’ensemble des médicaments, c’est que les résultats qu’on a à ce jour, montrent que ces résultats sont le plus souvent comparables chez les personnes co-infectées par rapport aux personnes mono-infectées. Et donc dans les ATU (Autorisation temporaire d’utilisation) qui sont à notre disposition, même si les essais ont été faits uniquement chez des personnes mono-infectées il y a des études d’interactions avec les antirétroviraux, ce qui permet de les utiliser chez les personnes traitées, co-infectées VIH/VHC. C’est vrai qu’il y a encore des choses à préciser, en particulier la durée des traitements. Il est possible que dans certaines circonstances, les durées de traitements puissent être raccourcis et dans d’autres au contraire, rallongées en particulier chez les patients qui ont des cirrhoses et peut-être chez des patients qui sont très immunodéprimés. En fonction du génotype du VHC, il y aura sans doute des génotypes qui sont plus durs à traiter, plus longs à traiter. Et puis chez les patients qui sont en échec des traitements antérieurs, en rechute, là aussi il y aura peut-être des traitements prolongés à faire.
Nous sommes sur le point d’aller enterrer l’interféron et personne ne va s’en plaindre. Mais alors quel est le coût de tout ça ? On ne peut pas ne pas aborder ce sujet même s’il n’est pas le plus important, parce qu’il faut se réjouir de ces résultats. Aujourd’hui un traitement anti-VHC par voie orale, c’est 1200 euros par jour. On peut espérer qu’avec l’afflux des médicaments, la concurrence va changer mais c’est vrai que c’est astronomique et ce n’est même pas très raisonnable.
La modératrice du débat : Je voulais juste dire un tout petit bémol quand on nous montre des 100% de guérison. 20 patients, pas de cirrhose. Donc attention, c’est une vraie révolution mais le 100% c’est…
Willy Rozenbaum : Oui, je ne suis pas rentré dans les détails parce que c’est vraiment un casse-tête. Il y a des études où il y a des cirrhoses où les résultats sont pratiquement équivalents. C’est compliqué mais je l’ai dit, probablement il faudra traiter plus longtemps les patients en cirrhose.
Transcription: Lucas Vitau
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