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14.02.2014

Les raisons pour dire non au tabac

Sandra : Vous êtes fumeur et vous pensez à arrêter ? Non pas du tout ? Bon, peut-être Jacques Cadranel va vous faire réfléchir et conforter les non-fumeurs dans leur choix.

Début de l’enregistrement.

Jacques Cadranel : Je suis le professeur Cadranel et je suis pneumologue à l’hôpital Tenon. Et mon lien avec l’infection VIH c’est qu’entre 1989 et 1996, l’unité dont je m’occupais en pneumologie, recevait beaucoup de personnes atteintes du VIH. A l’époque, les complications respiratoires étaient les plus fréquentes et les plus mortelles. Puis après grâce aux trithérapies à partir de 1996, heureusement les malades ont quitté l’hôpital. Ils sont rentrés chez eux. Et malheureusement actuellement, on les voit de nouveaux apparaître, arriver dans des services de pneumologie, soit pour des cancers du poumon, soit pour des maladies respiratoires chroniques, comme des fibroses, comme de la bronchopathie chronique obstructive, qu’ils font, peut-être, plus précocement que dans la population non infectée par le VIH.

C’est un service qui comporte 55 lits d’hospitalisation et 10 lits d’hôpital de jour. On fait environ 3500 à 4000 séjours par an en hospitalisation conventionnelle et environ 1000 à 1500 séjours en hôpital de jour en pneumologie.

La population VIH finalement a des problèmes respiratoires qui sont probablement sous-estimés, mais pour le moment ils ne sont pas particulièrement vus par les pneumologues dans l’état actuel des choses. Hors infection VIH, si je prends 100 personnes qui ont un cancer du poumon, 85 de ces 100 personnes ont été des fumeurs. Sont ou ont été fumeurs. Donc le grand facteur de risque du cancer du poumon dans tous les pays du monde c’est le tabac. Il y a quand même environ 15 à 20% a priori qui font des cancers du poumon alors qu’ils ne fument pas. Est-ce que les patients VIH qui ont un cancer du poumon, c’est plutôt des personnes qui n’ont pas fumé ou qui ont fumé ? Aujourd’hui très clairement, les personnes séropositives qui ont un cancer du poumon ont toutes fumé. Donc ça veut dire élément majeur numéro 1, le grand facteur de risque que j’ai un patient VIH d’avoir un cancer du poumon, ce n’est pas son infection VIH, c’est très clairement qu’il est fumeur.

Un patient VIH a tout intérêt à ne pas fumer et donc c’est compliqué parce que premièrement, on a des chiffres que globalement la population séropositive fume plus que la population non séropositive. Donc en proportion. Si je prends 100 personnes dans la rue non séropositif, il y a 30 qui seront fumeurs. Si je regarde que les personnes séropositives, on va monter peut-être à 40 ou 50. Deuxième point, les patients séropositifs lorsqu’ils fument, fument plus que les patients non séropositifs. Troisième point, il y a clairement une difficulté au sevrage du tabac chez la population séropositive pour des raisons qu’on ne sait pas expliquer aujourd’hui par rapport à un même fumeur non séropositif. Donc c’est une vraie préoccupation lorsqu’on est séropositif, de se poser la question d’essayer de savoir, est-ce que je fume ? Ça, on le sait très vite. Et surtout, comment je peux faire pour réduire mon tabagisme et pour arriver à l’arrêter.

Au jour d’aujourd’hui, il y a 3 cancers pour lesquels il y a effectivement un dépistage reconnu. C’est le cancer du sein, le cancer du col et le cancer du côlon. Jusqu’à encore aujourd’hui, il n’y a pas de remboursement pour un dépistage du cancer du poumon. Mais aujourd’hui on a des études qui permettent de penser que dans des populations à risque de cancer de poumon, réaliser un scanner dans des conditions particulières, permettraient de dépister dans ces populations-là, suffisamment de cancers pour que la mise en place du dépistage de ce type-là, soit acceptable pour la collectivité. C’est-à-dire que le dépistage diagnostique suffisamment de cancer et que ça ne coûte pas trop cher. Attention, ces études ont été faites dans la population non VIH et ça pose un énorme problème de dépistage parce que, si je prends 100 personnes très grandes fumeuses de 55 ans, je vais trouver chez 30 de ces 100 personnes, une anomalie sur le scanner de dépistage. Une anomalie. Et dans ces 25 à 30 anomalies, au fond, il va en avoir qu’une ou deux qui va être un cancer du poumon. Et ce qui pose un problème d’abord c’est le coût. J’aurais fait 70 scanners plus les 28 qui ne seront pas des cancers. Donc je vais faire 98 scanners entre guillemets pour rien. Bon, ça c’est peut-être acceptable. Mais pour les malades pour lesquels je vois une image anormale sur le scanner, je vais aller plus loin. Je vais faire d’autres examens qui vont être coûteux mais non seulement coûteux mais qui peuvent aussi procurer des effets secondaires, des douleurs, des risques d’accident de crachas de sang, de décollement du poumon. Donc tout un tas de complication. Donc le dépistage ce n’est pas si facile que ça à organiser surtout dans l’organe comme le poumon qui est très profond. Ce qu’on ne sait pas non plus, c’est si je prends maintenant 100 patients séropositifs et que je leur fais un scanner. Est-ce que je vais 30 anomalies ou 60 ? Parce qu’on sait malheureusement aussi que le poumon des patients infectés par le VIH est souvent plus anormal que le poumon des patients non infectés par le VIH. Donc je ne sais pas si je vais avoir encore plus de scanners anormaux chez les patients VIH et dans ces scanners anormaux, est-ce que je vais avoir plus de cancers de poumons. Donc aujourd’hui, la question du dépistage pose de manière générale, est-ce qu’elle sera applicable à la population VIH ? Est-ce qu’elle ne posera pas d’autres problèmes dans la population VIH ? On ne le sait pas. Il y a une étude qui est en cours en France, par un docteur qui s’appelle Alain Makinson, qui est porté par l’ANRS et qui justement, essaye de savoir la proportion de scanners anormaux chez des patients séropositifs qui fument. Pour savoir est-ce qu’on va en trouver 30 d’anormales ou 60 et s’ils sont anormaux, combien sont rattachés à un cancer ou à un antécédent d’infection respiratoire, à un antécédent de tuberculose, un asthme, etc. Donc c’est très compliqué.

Le pic de diagnostic c’est la soixantaine. Mais on peut avoir des cancers entre 20 et 100 ans. Donc le pic est à 60 ans. Ce qu’on constate dans la population infectée par le VIH c’est que c’est plutôt 45-50 ans. Donc un petit peu comme ce qu’on a dit tout à l’heure, on a l’impression que quand un patient est séropositif pour le VIH il fait plutôt les maladies qu’il ferait s’il n’était pas séropositif et qui sont reliées à l’âge.

Dans le cancer du poumon, la différence entre hommes et femmes, elle est plutôt, le sentiment est plutôt que le cancer du poumon, qui est peut-être une susceptibilité importante à faire un cancer du poumon chez la femme que chez l’homme. Mais vraiment là c’est, attention, faut manier ça avec beaucoup de pincettes et qu’au contraire peut-être que quand on est une femme et qu’on a un cancer du poumon, on a un meilleur pronostic ou un moins mauvais pronostic que quand on est un homme. Au cours de l’infection VIH c’est plus compliqué parce que va intervenir un petit peu le mode de transmission du VIH. Les femmes, leur mode de transmission va être plus largement hétérosexuel avec un partenaire séropositif ou par toxicomanie. Or, la toxicomanie est très fortement reliée au tabac. Vous comprenez bien qu’à ce moment-là la différence homme/femme dans le cancer du poumon du VIH va refléter aussi le mode de transmission différent du VIH dans la population homme, vous allez avoir bien sûr partenaire hétérosexuel, toxicomane mais aussi homosexualité alors que chez la femme l’homosexualité ne va pas être un facteur de transmission mais à ce moment-là on va avoir une proportion de plus de toxicomanes et de fumeurs et donc c’est un petit peu compliqué de répondre est-ce que vraiment le sexe au cours de l’infection VIH est un facteur indépendant de risque du cancer du poumon, ça, je suis incapable de répondre à cette question.

Les symptômes, parfois il n’y en a pas. Donc c’est vraiment la découverte à l’occasion d’un examen un peu systématique et donc il faut être très large dans la population séropositive, à demander la moindre fatigue, systématiquement dans le suivi du VIH, une radio de thorax. Et que s’il y a une anomalie tel quelle soit, il faut confier le malade à un pneumologue très rapidement pour qu’il y ait un bilan. Je dis bien très rapidement parce que là encore, l’impression qu’on a dans la population séropositive par rapport à la population non séropositive, c’est que l’agressivité de la maladie est plus importante et que des études sont assez curieuses, c’est-à-dire qu’on a l’impression que la population séropositive est plutôt plus surveillée que la population non séropositive, avec parfois des radios mais que parfois des patients ont une radio à un temps T et que 3 mois plus tard, ils reviennent avec un symptôme, on fait une radio et ils ont un cancer. On a l’impression qu’il y a vraiment une accélération de la maladie cancéreuse chez les patients séropositifs. Donc très attentif, assez facilement, de manière je dirai opportuniste, assez facilement demander une radio de poumon et un scanner de thorax si nécessaire. Et puis après les grands symptômes, ce qu’on appelle symptômes généraux : la perte de poids, la fatigue, rarement la fièvre permanente, des sueurs. Ça peut être des symptômes respiratoires : de la toux, des crachats de sang, de l’essoufflement, des bruits respiratoires. Et puis malheureusement ça peut être des symptômes reliés à l’étendue de la maladie : je me lève, je ne peux plus me servir de mon bras, j’ai un déficit neurologique, je me lève j’ai des douleurs dans le dos qui me clouent au lit, bah j’ai peut-être une métastase au niveau de l’os, etc.

Transcription : Sandra Jean-Pierre

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