Yann : «N’ayez pas de regard de dégoût envers des gens qui ont des fractures de vie»

Yann : Camerounais, camerounaise, vous allez être très déçus aujourd’hui car encore hier à 23h, c’était Manu Dibango que j’allais vous passer. Au final, comme j’ai vécu un truc bizarre et magnifique à la fois. Tout à fait ce que j’aime. Dans le métro hier soir, je me suis dit bah non tiens, si tu arrivais à retrouver ton album où il y a cette chanson Roger Cageot qui parle d’une personne SDF, d’un groupe mythique et formidable qui est Mano Negra, plus connu maintenant parce que Manu Chao a fait sa route tout seul. Donc hier je rentre vers 22h et je croise à métro place de Clichy un SDF à qui je dis bonjour, je donne parfois une banane ou une pièce. Mais en tout les cas je lui dis toujours bonjour quand on se croise parce qu’il squatte souvent devant La Poste. Il me reconnaît donc naturellement il vient me dire bonjour, il me taxe une clope, deux. Le métro arrive, on rentre ensemble. Il a une odeur de SDF, il s’assoit à côté de moi, on parle de tout, de rien, de la vie. Les gens commencent petit à petit à quitter les strapontins sur lesquels nous étions assis. Et je vois même dans leurs yeux une espèce de dégoût et un étonnement aussi pourquoi deux personnes si différentes arrivent à avoir une discussion qui justement parle de tout et de la vie. J’avais envie de faire un petit coup de gueule pour dire que n’oubliez pas que dans chaque personne, chaque détresse, il y a un humain, il y a une personne qui a eu une vie, qui a toujours une vie, à qui on doit le minimum de respect. Ce n’est pas souvent que ça m’arrive de faire un petit cri du coeur mais, je me suis dit s’il y avait plus d’attention et d’amour, je sais qu’on est super sollicité dans nos grandes villes par toute cette misère urbaine et tout ça, mais l’attention, le temps, c’est parfois s’arrêter, ce n’est pas forcément mettre la main au porte-monnaie. N’ayez pas de regard de dégoût envers des gens qui ont des fractures de vie. Ça peut malheureusement arriver à beaucoup de monde. Donc cette histoire que je vais vous faire écouter, c’est simplement l’histoire d’un monsieur qui s’appelle Roger. Roger Cageot parce qu’il a peut-être des cageots comme maisons et qui ne veut surtout pas qu’on l’emmerde.

Sandra : Merci Yann pour cette leçon de vie, ça fait bien. On va se quitter sur ce son-là, de Mano Negra.

Transcription : Sandra Jean-Pierre